Ce véhicule pèse deux fois et demi plus qu’un vélo électrique et 20 fois moins qu’une voiture ordinaire (1) tout en me donnant l’essentiel des prestations d’une voiture. C’est à dire un siège correct pour mon fessier qui devient délicat avec mon âge qui avance, une protection pluie escamotable et néanmoins toujours là, un coffre à bagages, une place d’appoint, des suspensions dignes de ce nom et bien sûr un moteur parce que mon énergie diminue avec, au risque de me répéter, mon âge qui avance.
Les performances d’une voiture sont inapprochables pour les transports alternatifs ?
Je roule à 25 km/h, ce qui est amplement suffisant en ville et même apaisant. Pour cause une loi, qui en contrepartie m’offre l’aubaine de pouvoir rouler avec un engin motorisé bidouillé sans avoir besoin d’homologation. Cela dit, le record du monde de vitesse à vélo couché caréné, sans autre moteur que des jambes de champion, est de 144 km/h : préparez vous à ce qu’un jour votre voiture se fasse doubler sur l’autoroute par un suppositoire géant propulsé par un moteur plus petit que celui de votre seul démarreur.
Je peux tracter un peu plus de 100 kilos et plus de 1,5 m³, avec des remorques adaptées. Certains vélos cargos tractent 400 kilos et 2 m³, avec 250 Watts. Tracter du lourd avec peu de puissance est avant tout une question de braquet, la puissance ne sert qu’à continuer à rouler à 130 à l’heure malgré la pleine charge. Et pas besoin non plus de peser plus d’une tonne pour charrier du poids.
Et faire des longues distances ?
J’aurais, paraît-il, un engin capable de faire le tour du monde. C’est juste moi qui suis pas taillé pour. Et faire aligner des centaines de kilomètres « dans la journée » à un véhicule léger et profilé peut se régler avec quelques panneaux solaires et quelques kilos de batteries, pas besoin de rentrer dans la spirale des voitures électriques qui embarquent des centaines de kilos de batteries dont une grande partie est dédiée charrier les centaines de kilos de batteries.
Non, rien n’est impossible à une mobilité légère.
Et puis de toutes façons on ne pourra pas indéfiniment se déplacer d’un claquement de doigts sur des milliers de kilomètres accompagnés de tonnes de ferraille, que ce soit sur pneus, sur rails, ou sur des ailes.
Alors autant chercher de suite quelque chose d’un confort acceptable qui pourra perdurer un peu plus longtemps.
Un confort seulement « acceptable » ?
Pas forcément non plus ! Deux pistes d’amélioration sont capables de vous faire oublier le petit confort douillet de nos chères usines à griller du combustible.
Un véhicule sobre est aussi un véhicule compact. Ce qui veut dire finis les bouchons, finie la quête d’une place de stationnement. Alors si c’est moins confort que votre voiture, le temps gagné fera que vous en souffrirez moins longtemps.
Pour être vraiment compact, faut être étroit. Pour être étroit sans être au ras du sol, faut être inclinable. Sans ça l’étroitesse envoie valser au premier virage. Et un véhicule inclinable, c’est un jouet à conduire, c’est pétri de qualités mécaniques et dynamiques que n’ont pas les « quatre roues qui virent à plat », ces héritières des charrettes d’antan. Là aussi, il y a de quoi oublier les allègements sur le confort.
Et accessoirement, si tous les véhicules deviennent compacts et étroits, les routes deviendront subitement démesurément larges sans ajouter la moindre once de bitume.
Sauf qu’un véhicule inclinable fait intervenir la notion d’équilibre. Ça peut tomber sur sol glissant, ça peut s’affaler à l’arrêt. Toute la difficulté est de solutionner ces petits soucis d’équilibre.
Déjà, par rapport aux deux roues, mettre une roue supplémentaire ajoute de la sécurité pour tourner ou pour freiner, surtout si cette roue supplémentaire est à l’avant.
Ensuite des petits aménagements mécaniques aident à rattraper quelques uns des inconvénients. Par exemple mon engin a des appuis pour les pieds qui dispensent d’avoir à mettre les pieds au sol et qui peuvent donner « manuellement »un appoint d’équilibre, ce qui va jusqu’à permettre de conduire sur la neige.
C’est encore insuffisant pour égaler la sensation de sécurité des voitures. Peut être que la solution ultime viendra de ces dispositifs électroniques de gestion d’équilibre qui deviennent courants sur cette micro-mobilité foisonnante de créativité, appelée Segways, hoverboards, gyroroues ou encore drones.
L’équilibre solutionné, il serait possible de mettre dans l’encombrement d’un deux roues tout ce qui semble rendre les voitures incontournables.
Et là, peut être bien que vous troquerez joyeusement votre chère usine à griller du combustible pour un suppositoire géant propulsé par un moteur plus petit que celui de votre seul démarreur.
Enfin vous pourrez savourer d’avoir retrouvé votre liberté de pencher.
(1) le véhicule pèse 65 kg « toutes options ». Un vélo électrique pèse 25 kg et le poids moyen d’une voiture en 2016 est de 1260 kg.